🎨🧠 Voir la musique ou manger des couleurs, le mystérieux monde de la synesthésie
🌈 Imaginez percevoir le monde en technicolor : la vie quotidienne extraordinaire des synesthètes dévoilé
Pour briller en soirée 💡
Certains synesthètes peuvent littéralement goûter les mots qu'ils entendent 🍽️
Des compositeurs célèbres comme Franz Liszt voyaient des couleurs en écoutant de la musique 🎨
La synesthésie peut se manifester de plus de 100 façons différentes 🌈
La synesthésie
Imaginez un monde où les lettres ont des couleurs vives, où les jours de la semaine possèdent des personnalités distinctes et où la musique dessine des formes dans l'espace. (t’es pas net Baptiste)
Et bien si, bienvenue dans l'univers étrange et merveilleux de la synesthésie !
C’est un phénomène neurologique fascinant qui mélange les sens.
Chez les synésthètes, la stimulation d'un sens, comme l'ouïe, déclenche simultanément une perception dans un autre sens, comme la vue.
Ainsi, entendre une note de musique peut faire apparaître une couleur, ou goûter un met peut évoquer une forme géométrique.
Vous l’avez ?
Personnellement j’ai toujours vu les nombres pairs bleus et les impairs rouges, sans même y réfléchir. C’est un peu comme si mon cerveau les avait appris avec ce code couleur et qu’il en avait fait ma réalité.
Longtemps considérée comme une simple bizarrerie, la synesthésie suscite depuis peu un vif intérêt scientifique.
Les recherches récentes ont en effet montré qu'il s'agit d'un phénomène neurologique bien réel, ancré dans notre fonctionnement cérébral.
Ce phénomène se retrouve sous une grande diversité de formes. En effet, comme le montre une étude américaine récente, il existerait plus d’une centaine de synesthésies différentes. La plus courante associe des couleurs aux chiffres, aux lettres ou aux jours de la semaine.
Les prémisses du phénomène
Et hop, on tire sur l’embrayage pour une petite marche arrière !
Tout a commencé avec Sir Francis Galton, le cousin de Charles Darwin (sympa la famille), qui fut le premier à étudier ce curieux mélange des sens à la fin du 19ème siècle. D’autres observations ont été effectués parallèlement par un psychiatre suisse, Carl Gustav Jung.
Cependant l'intérêt retomba, la synesthésie étant vue comme une simple curiosité, uniquement comportemental, sans fondement neuroscientifique réel.
Mais depuis une trentaine d'années, une nouvelle génération de chercheurs a repris le flambeau avec des méthodes modernes d'imagerie cérébrale et de psychologie expérimentale.
Leurs travaux ont révolutionné notre compréhension de la synesthésie.
Première découverte : la synesthésie est une expérience sensorielle authentique, pas une simple association d'idées ou une métaphore poétique.
Quand une personne synesthète voit une lettre colorée, elle perçoit réellement sa couleur, même si celle-ci est moins vive que dans la réalité. Des expériences astucieuses l'ont démontré.
Par exemple, si on mélange des 2 parmi des 5 dans une image, un non synesthète mettra un certain temps à repérer les 2 cachés dans la masse des 5. Mais un synesthète pour qui les 2 sont verts et les 5 rouges repérera immédiatement les 2, car ils lui apparaîtront d'une couleur différente. La synesthésie facilite donc certaines tâches perceptives. (A chacun son talent !)
Autre preuve de l'authenticité de la synesthésie : sa constance. Un(e) synesthète associera toujours les mêmes couleurs aux mêmes lettres ou chiffres, même à plusieurs mois d'intervalle. Impossible de tricher !
De plus, les associations synesthésiques sont automatiques et difficiles à réprimer.
Si on montre à un synesthète un 5 écrit en vert, alors que pour lui le 5 est rouge, il mettra plus de temps à nommer la couleur de l'encre que si le 5 est écrit en rouge.
Mais comment expliquer ces associations incongrues entre sons et couleurs, goûts et formes ? L’imagerie cérébrale et notamment l’utilisation de l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) nous donne quelques pistes !
Le feu d’artifice cérébral
Chez les synesthètes graphème-couleur, voir des lettres ou des chiffres active des zones du cerveau dédiées à la perception des couleurs, en plus des zones dédiées à la reconnaissance de la forme des lettres et des chiffres.
Tout se passe comme si des connexions inhabituelles reliaient ces différentes régions cérébrales chez les synesthètes, dingo non ?
Mais pourquoi ces connexions anormales apparaissent-elles ?
Seconde découverte : L'hypothèse la plus probable met en cause des facteurs génétiques.
La synesthésie est souvent présente dans une même famille, suggérant qu'elle se transmet par les gènes.
Lors de nos premières années de vie, nos neurones sont en si grand nombre que de nombreuses connexions nécessitent d’être éliminées afin de maintenir une stabilité neuronale et le bon développement des régions sensorielles.
Chez les synesthètes, on pense qu'une mutation génétique empêcherait l'élimination des connexions superflues qui relient différentes régions sensorielles dans le cerveau du bébé.
Ces connexions persisteraient, permettant des échanges inhabituels entre modalités sensorielles.
Cette théorie expliquerait notamment pourquoi la synesthésie prend des formes si diverses. Selon les connexions qui sont maintenues, on pourra associer des couleurs aux sons, des goûts aux mots ou des formes aux saveurs.
La génétique n'explique cependant pas tout.
L'environnement joue aussi un rôle pour façonner les associations synesthésiques.
Par exemple, une revue de littérature relate que les synesthètes anglophones associent plus souvent le R avec le rouge (red) montrant également l'influence du langage.
Dans cette même revue, l’auteur décrit également des situations intrigantes et mystérieuses.
C’est notamment le cas de ce synesthète daltonien qui percevait des couleurs synesthésiques qu'il ne pouvait pas voir dans la vie ! (attend, quoi ?)
Comme ce dernier exemple le souligne, beaucoup de questions restent en suspens, et c’est tant mieux car ça laisse une vraie place à l’imaginaire !
Une chose est sûre : la synesthésie nous offre une fenêtre fascinante sur les mystères du cerveau et de la perception.
Jolie description Bertrand, mais maintenant qu’est-ce qu’on en fait ?
Excellente question, je vous explique !
La synesthésie est notamment une porte grande ouverte à la créativité et à l’imagination.
Synesthésie et potentiel créatif
La création artistique découle de l’imaginaire et de la sensibilité des humains qui se l’approprient.
Dans cette logique, le couplage de deux propriétés sensorielles permet une capacité d’association spontanée bien supérieure à la moyenne.
Ce phénomène a notamment été évoqué à de nombreuses reprises dans le monde artistique, notamment en musique
Imaginez la tête des musiciens de l'orchestre de Weimar en 1842, lorsque le compositeur et pianiste hongrois Franz Liszt leur a demandé de jouer "un peu plus bleu" et "moins rose" !
Richard Wagner, un autre synesthète présumé, a carrément quitté une répétition de Tristan et Iseut en râlant que les couleurs étaient "complètement à côté de la plaque".
Musique, écriture, peinture, les exemples de la relation entre ce phénomène et la création artistique sont nombreux.
Chez ces artistes, le phénomène de synesthésie semble être inné et inhérent à chaque sujet qui est traversé par cette sensibilité. Cependant d’autres formes de ce phénomène sont observables. Tout d’abord ce qu’on appelle la synesthésie d’associations temporaires, développé chez un sujet par la prise de produits médicamenteux ou de drogues.
En effet, ces produits semblent créer des expériences similaires, puisque celles-ci ont été rapportées chez des individus en bonne santé prenant de la mescaline ou du LSD (Hartman & Hollister, 1963).
Théophile Gautier, poète français , décrivit le son des couleurs lorsqu’il avait pris du haschisch (yeahhh man):
Mon ouïe s’était prodigieusement développée ; j’entendais le bruit des couleurs. Des sons verts, rouges, bleus, jaunes, m’arrivaient par ondes parfaitement distinctes. Un verre renversé, un craquement de fauteuil, un mot prononcé tout has, vibraient et retentissaient en moi comme des roulements de tonnerre. Chaque objet effleuré rendait une note d’harmonica ou de harpe éolienne. (*L’abus de cannabis est dangereux pour la santé*)
Plus surprenant encore, des expériences synesthésiques ont été rapportées chez des patients souffrant de lésions cérébrales (Eagleman et al., 2007) et chez des personnes atteintes de la maladie de Parkinson (Fénelon & Alves, 2010).
Enfin, des cas fascinants de patients post AVC ont été relatés. Notamment celui d’une patiente française, qui, à son retour de l’hôpital, s’est découvert un potentiel artistique captivant. En s’initiant à la peinture chez elle, elle se rendit compte de compétences “quasi professionnelles”, associées aux respects des différents plans d’une oeuvre, à une sensibilité et une précision dans le dessin questionnant, pour une amatrice n’ayant jamais eu d’expériences de peinture avant son accident vasculaire cérébral.
Ce phénomène inouïe était associé à une synesthésie déclaré post AVC, où la nouvelle artiste combiner ses sensations de douleurs et de chaleurs (proprioception) aux couleurs qu’elle imaginait sur ses œuvres.
Voilà ce qu’est la synesthésie. Une expérience qui traverse un individu et élève sa sensibilité et son regard sur le monde.
Elle nous rappelle que nous ne voyons pas tous la vie de la même façon.
Alors la prochaine fois que vous entendrez un air de musique, imaginez toutes les couleurs et les formes qu'il peut évoquer dans l'esprit d'un synesthète !
Bonne soirée !
Cérébralement vôtre,
Bertrand & Romain 🧠✨
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Pour aller plus loin
👉 Roman : Roue libre en kaléidoscope: Voyage au coeur de la synesthésie.
👉 Podcast : Voir les sons : la synesthésie
L’énigme de la semaine !
L’énigme de la semaine dernière était :
Je suis toujours affamé, je dois toujours être nourri. Le doigt que je touche aura bientôt rougi. Qui suis-je ?Et la réponse était : le feu (mais on nous a proposé aussi par email “le scroll” qu’on a beaucoup apprécié ! Bien joué !
La nouvelle énigme est : 👇
Qu'est-ce qui devient plus petit quand on le met à l'envers ?Chargement...
Disclaimer : Les informations présentées dans cette newsletter s'appuient sur des recherches scientifiques. Cependant, les résultats ne sont pas des certitudes absolues et représentent parfois des corrélations sans prouver de causalité directe. La science des neurosciences évolue constamment. Ces conseils sont des pistes de réflexion à considérer avec esprit critique.
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