🧠💊 Des drogues illégales pour soigner
🔬 De la kétamine contre la dépression : quand l'anesthésiant pour chevaux devient un traitement express.
⏱ Temps de lecture : 13 minutes
Pour briller en soirée 💡
Les psychédéliques n'ont pas de propriétés addictives, contrairement aux idées reçues 🤯
Les microdoses de méthamphétamine peuvent accélérer la maturation des nouveaux neurones 🔋
La FDA a reconnu la psilocybine comme "traitement révolutionnaire" pour la dépression en 2023 🔬
La drogue c’est mal quand même.
Salut l’équipe !
Bertrand à l’antenne !
Imaginez une journée ordinaire, où vous vous réveillez avec une sensation de lourdeur, comme si un nuage noir s'était installé sur votre esprit.
Pour des millions de personnes, cela n'est pas qu'une simple mélancolie passagère, mais un symptôme de troubles mentaux qui impactent leur vie quotidienne.
Maintenant, imaginez : une pilule d’ecstasy, quelques séances avec un neuropsychologue, et en résultat des effets durables pour sur votre cerveau et votre souffrance psychique. Vraiment ?
Et oui, une révolution est en marche dans le monde de la psychiatrie !
On vous parlait justement la semaine dernière de la DMT, drogue psychédélique que le corps produit lui-même. Cette semaine, on attaque de pleins fronts ce sujet pour vous parler de traitements prometteurs utilisant ces drogues. La psilocybine (champignons), la MDMA et le LSD sont toutes des drogues qui émergent actuellement pour soigner des troubles de santé mentale jusque-là difficiles à traiter.
Pour mieux comprendre l'ampleur de cette transformation, remontons aux origines de ces découvertes surprenantes.
L’exemple des psychédéliques
Les psychédéliques, autrefois perçus comme des méchants démons, reviennent aujourd'hui sur le devant de la scène médicale avec une nouvelle aura.
Avant d’être expérimenté par le monde de la recherche, ces produits étaient surtout présents parmi les communautés hippies et les adeptes de la musique électronique (ce bon vieux boom boom).
Bien que ces pratiques soient devenues illégales et souvent associées à la toxicomanie, les psychédéliques n'ont jamais eu de propriétés addictives.
(Ah ouai ?)
💡 Dans les forêts amazoniennes, l'ayahuasca est traditionnellement utilisée par les chamans pour guérir des maladies mentales. Des chercheurs ont constaté que des retraites de guérison avec l'ayahuasca pouvaient réduire les symptômes de dépression chez des participants.
Les recherches se précisent dans les années 1990 avec l'émergence du « tourisme chamanique » en Amérique latine, où les psychédéliques jouent un rôle clé dans la guérison, captivant l'intérêt des occidentaux.
S’en inspire des pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni et la Suisse, qui lancent, à cette période là, des recherches cliniques sur ces substances pour diverses applications médicales.
Les premiers résultats obtenus sont prometteurs.
En témoignent les congrès français de psychiatrie, qui consacrent, depuis, une place importante aux psychédéliques dans leurs colloques et recherches. Les premières thérapies associant des psychédéliques à un suivi psychologique voient le jour !
Mais comment fonctionnent ces thérapies ?
Lors des séances d'administration du produit psychédélique, les thérapeutes encouragent le patient à explorer et à faire émerger ses pensées sombres sous l'influence du LSD, dans un objectif de guérison.
Les effets du LSD permettent réellement à l'individu d'accéder à des perceptions et des réflexions de manière neutre (sans aucune émotions liées à sa dépression). Et donc de créer de nouvelles manières de traiter ces souvenirs !
Certaines personnes avec des décennies de traitement arrêtent les antidépresseurs, des patients souffrant de TOC voient leurs symptômes disparaître directement après une séance, d’autres traités pour la dépression reviennent un mois plus tard et ont totalement arrêté de boire et de fumer sans en avoir pris la décision.
De vraies promesses !
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Fin octobre 2023, la FDA américaine a octroyé le statut de "traitement révolutionnaire" à la psilocybine pour la dépression récalcitrante.
Si ces résultats sont déjà impressionnants, ils ne représentent qu'un aspect des innovations en psychiatrie. En effet, d’autres produits de synthèse ont également de belles perspectives en termes de traitement de maladies neuropsychologiques !
Mais comment ces drogues agissent-elles concrètement sur notre cerveau ?
Une belle trousse de pharmacie
OK, on sait donc, que ces produits, à un dosage subtile, vont avoir un effet bénéfique sur les maux de notre cerveau.
Mais quels effets spécifiques sur notre fonctionnement cérébral?
Les drogues vont agir sur différents canaux cérébraux et notamment sur les neurotransmetteurs.
Un neurotransmetteur est une substance assurant le passage de l'information entre les cellules nerveuses.
Dopamine, sérotonine, endorphine, ces substances régulent nos émotions, notre plaisir, mais également notre niveau d’éveil ou notre faim. Les neurotransmetteurs ont un rôle crucial dans la régulation de nos comportements.
Les drogues mises en jeu dans ces traitements viennent donc bousculer notre fonctionnement mental !
La MDMA
La MDMA est une molécule psychostimulante de la classe des amphétamines. Elle est souvent utilisée comme drogue, vendue alors sous forme de cristaux ou de pilules sous le nom d'ecstasy.
Cette drogue a obtenu la même désignation en 2017 pour traiter les états de stress post-traumatique. Les résultats sont étonnants, en particulier chez des patients auparavant récalcitrants aux soins conventionnels. La MDMA booste l'empathie et permet de revisiter les souvenirs traumatiques sans être submergé par l’émotion associée.
Comment ça marche ?
La MDMA va inhiber les régions responsables des émotions et permettre d’accéder aux régions responsables de la mémoire, sans la connotation émotionnelle. C’est fou non ?
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Rachel Hope souffrait d'un trouble de stress post-traumatique
sévère lié à des abus sexuels durant l'enfance et un accident de voiture grave. Après une seule séance de thérapie assistée par MDMA, elle estime que 80% de ses symptômes ont disparu immédiatement, suivis de 10% supplémentaires dans les semaines suivantes. Son score CAPS (mesure de sévérité du trouble) est passé de 86 à seulement 14 trois ans après le traitement.
Champignons et LSD
De leur côté, les psychédéliques dont on parlait plus tôt, comme la psilocybine et le LSD, agissent sur la sérotonine, et induisent une "tempête mentale contrôlée" favorisant l'optimisme et le sentiment de bien-être chez le patient.
Cette approche thérapeutique se distingue des antidépresseurs classiques car elle ne nécessite que quelques séances ciblées plutôt qu'une prise quotidienne de médicaments. En se liant aux récepteurs de la sérotonine, ces substances diminuent également l'activité de l'amygdale, une région cérébrale associée à la peur, ce qui permet au patient de revisiter ses expériences difficiles sans être submergé par des émotions négatives.
La Kétamine
Terminons cette liste d’exemple avec une drogue moins conventionnelle, la kétamine. Oui, oui on parle bien de la drogue qui endort les chevaux !
C’est un anesthésique couramment utilisé qui a montré un effet sur la dépression résistante, lorsque d’autres traitements ont échoué. Une méta-analyse (un regroupement statistique de plusieurs études) des essais cliniques incluant la kétamine propose des résultats surprenants !
La kétamine a un effet immédiat ! Oui, seulement quelques heures, dans les troubles dépressifs unipolaires et bipolaires. L’effet est bien sûr limité dans le temps, mais son impact est bien réel ! Les antidépresseurs mettant en moyenne 3 semaines à faire effet, la perspective de la kétamine semble pertinente pour passer de épisodes à haut risque comme les crises suicidaires.
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Dans les études cliniques, environ 63% des patients traités ont vu leurs idées suicidaires disparaître, contre 32% dans le groupe placebo. Son action est particulièrement rapide, commençant dès 240 minutes après l'administration.
Drogues thérapeutiques mais pas que…
La méthamphétamine est une drogue psychostimulante hautement addictive, dont les effets varient selon la dose et la fréquence d’utilisation. Elle est notamment utilisée aux États-Unis pour traiter les troubles de l’attention et l’hyperactivité.
Sofia Baptista, et ses collègues, se sont intéressés aux effets de la méthamphétamine sur nos capacités de mémoire.
Leurs résultats dépassent le cadre du traitement pharmacologique.
En effet, ils montrent notamment que le traitement pourrait avoir un effet positif sur notre capacité à mémoriser des informations.
Les recherches menées par son équipe révèlent un phénomène fascinant : la drogue entraîne une maturation accélérée des neurones juste après leur naissance.
En gros, un booster de neurones tout neuf, chez les personnes ayant administré une microdose de METH. Cette observation a été faite dans le gyrus denté, une zone clé pour la mémoire et l'apprentissage.
En résumé, l'administration de faibles doses de METH sur le moyen terme pourrait booster la plasticité synaptique à un stade précis de développement neuronal, améliorant ainsi potentiellement nos capacités mémorielles.
Ces découvertes ouvrent la voie à une question cruciale : comment l'usage prolongé de METH transforme-t-il ces effets bénéfiques sur la neurogenèse et la plasticité synaptique en impacts négatifs sur les capacités cognitives des personnes dépendantes ? Où est la limite, le curseur ?
Car la prudence est de mise. Un dosage inadapté ou une prédisposition peuvent déclencher des troubles associés comme des psychoses.
Certains experts recommandent de réserver ces traitements aux cas d'impasse thérapeutique. C’est le principe de la balance risques/bénéfices en médecine, qui est constamment utilisé dans ces nouvelles thérapies !
💡 Autre exemple, une étude a révélé que la cocaïne, malgré son potentiel addictif, pourrait avoir des effets bénéfiques sur la mémoire à court terme lorsqu'elle est administrée sous surveillance médicale.
Des perspectives passionnantes
Le mécanisme exact, entraînant une réorganisation cérébrale et la modification des comportements, reste également à approfondir.
Néanmoins, si les promesses se confirment, la psychiatrie pourrait connaître une petite révolution.
Les drogues restent des produits dangereux et pour la plupart addictif, et ne sont pas une solution sans avis médical. Mais ces produits, en microdosage, ouvre des perspectives passionnantes pour renouveler notre approche de la santé mentale. Car comme Gandhi nous le rappelle, “le bonheur est dans l’équilibre”.
Et vous, vous en pensez quoi ce tout ça ?
Pour aller plus loin 👀
👉 Livre : Les usages de la drogue comme traitement de soi
👉 Podcast : Les thérapies psychédéliques, la révolution en psychiatrie ?
Wait wait ! C’est pas fini ! cette semaine, on introduit de nouveau format 👇👇👇
Neuro-Actualités 📰
Qu’est-ce qu’il s’est passé cette semaine dans la presse au sujet des neurosciences. Cérébral à enquêter pour vous 🕵️
1 - Une neuroscientifique s'est scannée le cerveau 75 fois en un an pour étudier l'impact du cycle menstruel et de la pilule contraceptive sur son cerveau. L'étude révèle que le volume et la connectivité du cerveau changent naturellement au cours du cycle menstruel, et que la pilule contraceptive influence légèrement ces paramètres. Cette recherche pionnière ouvre la voie à une meilleure compréhension des effets hormonaux sur le cerveau féminin, un domaine jusqu'ici sous-étudié. Lien
2 - On pensait que seuls les neurones, ces cellules du cerveau, étaient responsables de nos souvenirs. Mais surprise ! Des chercheurs viennent de découvrir que d'autres cellules en forme d'étoiles, les astrocytes, sont aussi très importantes pour notre mémoire. Elles travaillent mains dans la main avec les neurones pour garder nos souvenirs. Cette découverte pourrait aider les médecins à mieux comprendre et soigner des maladies comme Alzheimer, où la mémoire ne fonctionne plus correctement. Lien
Des chercheurs danois ont fait une découverte importante sur les antidépresseurs les plus couramment prescrits (ISRS). Ces médicaments peuvent non seulement améliorer l'humeur (comme on le disait plus haut dans notre article, en jouant en partie sur la sérotonine), mais aussi aider à retrouver une meilleure mémoire, notamment pour se souvenir des conversations : “les antidépresseurs les plus prescrits actuellement, améliorent la mémoire verbale, telle que le souvenir d’une conversation, en jouant sur une voie métabolique particulière”. Cette avancée est particulièrement significative car environ une personne sur cinq en France sera touchée par la dépression au cours de sa vie. Lien
Les neurosciences en chiffres 🧮
Quelques statistiques qui nous on marqué cette semaine :
Les effets d'une histoire sur la mémoire ne diminuent que d'environ un tiers après une journée, alors que les effets des statistiques diminuent de 73%. Lien
Le cerveau peut stocker près de 10 fois plus de données que ce que l'on pensait auparavant. Lien
Les enfants exposés à plus de 4 heures d'écran par jour à l'âge d'un an montrent des retards de développement dans la communication et la résolution de problèmes à 2 et 4 an. Lien
Inspiration neuronale ☁️
Le cerveau, aussi occupé qu'il puisse être, est en fait très paresseux... Il voit ce qu'il s'attend à voir » Dr. James R. Doty
Voilà, c’est tout pour cette semaine !
Cérébralement vôtre,
Bertrand & Romain 🧠✨
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L’énigme de la semaine ! 🕵️
L’énigme de la semaine dernière était :
Vous avez trois ampoules dans une pièce fermée et trois interrupteurs à l'extérieur. Vous êtes en dehors de la pièce et ne pouvez entrer qu'une seule fois dans celle-ci. Comment identifiez-vous quel interrupteur correspond à chaque ampoule ?
Et la réponse était : Allumez le premier interrupteur et attendez quelques minutes. Éteignez-le, allumez le deuxième et entrez dans la pièce. L'ampoule allumée correspond au deuxième interrupteur, celle chaude mais éteinte au premier, et la troisième à l'interrupteur restant.
La nouvelle énigme est : 👇
Je répète tout ce que vous dites, mais je ne suis pas un perroquet. Qui suis-je ?
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Disclaimer : Les informations présentées dans cette newsletter s'appuient sur des recherches scientifiques. Cependant, les résultats ne sont pas des certitudes absolues et représentent parfois des corrélations sans prouver de causalité directe. La science des neurosciences évolue constamment. Ces conseils sont des pistes de réflexion à considérer avec esprit critique.
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