đ§©đČ LâĂ©trange expĂ©rience rĂ©ussie par des chercheurs françaisâŠ
đ 70% des personnes l'ont expĂ©rimentĂ©, mais peu comprennent pourquoi. Plongez dans les secrets de cette Ă©trange sensation qui fait douter de votre propre rĂ©alitĂ©.
Salut lâĂ©quipe !
DĂ©jĂ , bienvenue aux petits nouveaux. Nous avons pas mal de monde qui nous a rejoint ces derniĂšres semaines, câest trop cool !
Ensuite, merci Ă tous les professionnels qui nous ont rĂ©pondu la semaine derniĂšre. Cela fait Ă©normĂ©ment plaisir, et ça nous honore dâĂȘtre suivis par une communautĂ© aussi qualifiĂ©e.
On a un petite annonce Ă vous faire ! đŁ
On va ĂȘtre honnĂȘtes : on a un peu fait les cordonniers mal chaussĂ©s.
On parle souvent de surcharge cognitive, dâattention limitĂ©e, de lâimportance de dĂ©couper lâinformationâŠ
EtâŠ.on a reçu plusieurs fois le retour que nos newsletters Ă©taient un peu longues. Passionnantes (on espĂšre), mais longues.
Alors on a pris une dĂ©cision logique (et neurologiquement cohĂ©rente on lâespĂšre): Ă partir de maintenant, on passe Ă 2 newsletters par semaine (1 le dimanche et 1 le mercredi matin)
LâidĂ©e, câest de vous proposer des contenus plus courts, plus faciles Ă digĂ©rer⊠et plus cohĂ©rents avec ce quâon raconte depuis le dĂ©but sur la charge cognitive.
On applique donc nos propres conseils Ă nous-mĂȘmes. Câest la moindre des choses pour une newsletter sur le cerveau, non ? đ§
Allez, on attaque cette nouvelle formule !
Vous retrouverez au programme de cette épisode :
Le Dossier de la Semaine đ
RĂ©activation Neuronale âĄ
đĄ Pour briller en soirĂ©e
Si vous nâavez pas le temps de tout lire, vous trouverez ici les informations les plus croustillantes de notre Ă©pisode !
Le dĂ©jĂ -vu survient plus souvent en intĂ©rieur qu'en extĂ©rieur, et gĂ©nĂ©ralement en fin de journĂ©e quand notre cerveau est fatiguĂ© đ
Des chercheurs français ont rĂ©ussi Ă dĂ©clencher artificiellement un dĂ©jĂ -vu en 2012 en stimulant simplement une rĂ©gion prĂ©cise du cerveau đŹ
Les personnes Ă©pileptiques sont bien plus sujettes aux dĂ©jĂ -vus : 22% pendant leurs crises et jusqu'Ă 62% entre leurs crises ! đ§
đ Le Dossier de la Semaine
Chaque semaine, nous disséquons minutieusement une thématique des neurosciences pour vous offrir un éclairage complet et captivant !
đ§ đŹ DâoĂč vient ce sentiment troublant de dĂ©jĂ vu ?
â±ïž Temps de lecture : 6 minutes.
Vous marchez dans une rue inconnue, quand soudain, une boutique attire votre regard. "Attendez⊠Je suis dĂ©jĂ venu ici, non ? Ces vitrines, cette lumiĂšre⊠Tout me semble bizarrement familier." Pourtant, câest impossible : câest votre premier voyage dans cette ville.
Ce sentiment Ă©trange, câest le dĂ©jĂ -vu â une impression fugace, mais troublante, dâavoir dĂ©jĂ vĂ©cu un moment alors que câest objectivement la premiĂšre fois.
đĄ Le terme "dĂ©jĂ -vu" a Ă©tĂ© introduit en 1876 par le chercheur français Ămile Boirac, qui le dĂ©crivait comme "le souvenir du prĂ©sent" dans son livre "L'Avenir des sciences psychiques"
65 Ă 70% des gens en ont fait lâexpĂ©rience au moins une fois. Mais que se passe-t-il vraiment dans notre cerveau lors de ce ressenti familier ?
Longtemps associĂ© Ă des croyances mystiques (vies antĂ©rieures, prĂ©monitionsâŠ), le dĂ©jĂ -vu intĂ©resse aujourdâhui les neurosciences et la psychologie. Et bonne nouvelle : on commence Ă comprendre son origine !
Spoiler : pas besoin dâinvoquer la rĂ©incarnation⊠juste un petit "bug" de notre mĂ©moire.
Alors, pourquoi notre cerveau nous joue-t-il ce tour ? Et surtout⊠est-ce normal ?
Câest parti pour lâenquĂȘte !
Le déjà -vu, une illusion de la mémoire
Le dĂ©jĂ -vu est cette sensation fugace, mais intense, dâavoir dĂ©jĂ expĂ©rimentĂ© une situation alors que câest objectivement impossible. Contrairement Ă ce quâon pourrait croire, ce nâest pas un phĂ©nomĂšne paranormal ni une preuve de vies antĂ©rieures (dĂ©solĂ© pour les adeptes de rĂ©incarnation !).
En 2006, une Ă©tude de lâUniversitĂ© de Leeds a rĂ©ussi Ă induire artificiellement des dĂ©jĂ -vus chez des participants en utilisant des techniques de suggestion hypnotique.
đĄ La suggestion hypnotique se rĂ©sume par le « fait dâinspirer Ă quelquâun, une idĂ©e, une croyance⊠Sans quâil en ait conscience ».
Preuve que le phénomÚne est bien lié à un mécanisme cérébral et non à une expérience mystique.
Le dĂ©jĂ -vu est un sentiment pouvant provenir de multiples expĂ©riences de vie : dĂ©jĂ rencontrĂ©, dĂ©jĂ visitĂ©, dĂ©jĂ su, dĂ©jĂ fait, dĂ©jĂ Ă©prouvĂ© etc. Le phĂ©nomĂšne ne dure gĂ©nĂ©ralement pas plus de trente secondes et survient plutĂŽt en intĂ©rieur quâen extĂ©rieur et en fin de journĂ©e.
đĄ Il existe d'autres phĂ©nomĂšnes similaires mais distincts : le "jamais vu" (sensation d'Ă©trangetĂ© face Ă quelque chose de familier) et le "presque vu" (impression d'ĂȘtre sur le point de se rappeler quelque chose)
Pour une majorité des chercheurs en psychologie cognitive, la déjà -vu se rapporterait à un dysfonctionnement temporaire de la mémoire.
Notre cerveau aurait un "bug" en comparant une nouvelle expérience avec des souvenirs stockés, créant une fausse impression de familiarité.
Commençons donc notre enquĂȘte en ciblant les rĂ©gions responsables de nos mĂ©morisations les plus fines.
Les mécanismes cérébraux du déjà -vu
Premier lieu du crime, lâhippocampe.
Lâhippocampe, une petite rĂ©gion du cerveau essentielle pour la mĂ©moire, joue un rĂŽle clĂ©. Il nous permet de reconnaĂźtre des lieux et des situations.
Selon une des thĂ©ories proposĂ©es, lors dâun dĂ©jĂ -vu, lâhippocampe activerait par erreur des circuits de reconnaissance familiĂšre, alors que la scĂšne est nouvelle.
Une étude pour étayer ces propos ? Oui bien sûr.
Prenons la population épileptique. De maniÚre surprenante, les chercheurs ont découvert que cette population était statistiquement plus en proie à vivre des épisodes de déjà vu que le reste de la population.
Le dĂ©jĂ -vu a souvent Ă©tĂ© Ă©tudiĂ© chez les personnes Ă©pileptiques, car câest un symptĂŽme qui apparaĂźt frĂ©quemment pendant leurs crises. Pendant une crise, lâactivitĂ© Ă©lectrique des neurones se dĂ©rĂšgle et sâĂ©tend dans le cerveau, atteignant une zone appelĂ©e lobes temporaux mĂ©dians (rĂ©gions de lâhippocampe) .
đĄ Environ 22% des patients Ă©pileptiques expĂ©rimentent des dĂ©jĂ -vus "ictaux" (pendant les crises) et 62% des dĂ©jĂ -vus "interictaux" (entre les crises), faisant de cette population un groupe d'Ă©tude prĂ©cieux â mĂȘme si, bien sĂ»r, personne ne leur envie leur expĂ©rienceâŠ
Ce "court-circuit" provoque alors une sensation de déjà -vu au début de la crise.
Chez ces sujets, câest une petite rĂ©gion sous lâhippocampe, appelĂ©e cortex rhinale, qui serait responsable de cette impression.
En 2012, des chercheurs français ont mĂȘme rĂ©ussi Ă dĂ©clencher un dĂ©jĂ -vu chez des patients en stimulant cette zone.
Ces Ă©tudes sur les Ă©pileptiques renforcent la piste dâune implication de la rĂ©gion hippocampique dans la crĂ©ation du sentiment de dĂ©jĂ -vu.
Mais alors quâen est-il des personnes sans Ă©pilepsie ?
Deux hypothĂšses existent :
soit leur cerveau produit des décharges électriques similaires sans crise,
soit le dĂ©jĂ -vu vient dâun tout autre mĂ©canisme. Oui mais lequel ?
Quand le cerveau sâemmĂȘle
Et bien des chercheurs proposent une autre interprétation cérébrale du sentiment de déjà -vu.
Notre cerveau confondrait une nouvelle expĂ©rience avec un souvenir stockĂ©, comme si un fichier Ă©tait mal Ă©tiquetĂ©. Cette hypothĂšse suggĂšre que le dĂ©jĂ -vu rĂ©sulterait dâun dĂ©calage entre deux systĂšmes de mĂ©moire :
La mĂ©moire Ă court terme (qui enregistre lâinstant prĂ©sent)
La mémoire à long terme (qui stocke les souvenirs)
Quand les deux se synchronisent mal, le cerveau interprĂšte une nouvelle information comme un souvenir ancien.
Le bug aurait lieu, selon cette hypothĂšse, au niveau du cortex prĂ©frontal. Pour rappel celui-ci le chef dâorchestre de nos prises de dĂ©cisions et de notre fonctionnement exĂ©cutif plus globalement.
đĄ Le cortex prĂ©frontal est la derniĂšre rĂ©gion cĂ©rĂ©brale Ă se dĂ©velopper complĂštement, n'atteignant sa maturitĂ© totale que vers 25 ans.
Diverses études vont dans ce sens avec des résultats assez surprenant.
On vous en présente deux.
La premiÚre a été publiée dans Cortex en 2018.
Grùce à une étude quantitative, les chercheurs ont mis en évidence que les jeunes adultes (15-25 ans) vivent plus de déjà -vus que les personnes ùgées.
Une piste ? La plasticité cérébrale plus importante chez les jeunes pourrait favoriser ces "erreurs" de mémoire.
Câest Ă dire ?
Et bien, comme vous le savez le cerveau humain se développe tout au long de la vie. Seulement, certaines régions stratégiques du cerveau arrive à maturation à un certain ùge.
Câest le cas du cortex prĂ©frontal (et donc des fonctions exĂ©cutives) qui arrive Ă un cĂąblage optimal aux alentours de 25 ans.
Avec ces Ă©lĂ©ments, la survenue de plus de dĂ©jĂ -vus chez la population des 15-25 ans pourraient ĂȘtre Ă©troitement liĂ©e Ă la maturation de leurs fonctions exĂ©cutives comme la mĂ©moire de travail ou lâinhibition, crĂ©ant chez eux des bugs de traitement entre informations stockĂ©es et prĂ©sentes.
La seconde étude.
Celle-ci explore le phénomÚne du déjà -vu en suggérant qu'il pourrait s'agir d'une "illusion de prédiction" plutÎt que d'un simple bug de mémoire. Les auteurs proposent que le cerveau génÚre une fausse impression de connaissance lors de situations nouvelles mais familiÚres.
Via des expĂ©riences en rĂ©alitĂ© virtuelle, les chercheurs ont exposĂ© des participants Ă des environnements similaires (sans quâils sâen rendent compte), puis mesurĂ© leurs rĂ©ponses face Ă des scĂšnes "nouvelles" dĂ©clenchant des sensations de dĂ©jĂ -vu.
Résultats clés :
Le déjà -vu survient quand le cerveau perçoit une similarité inconsciente entre une expérience actuelle et passée.
Les participants avaient tendance Ă croire pouvoir "prĂ©dire" la suite lors dâun dĂ©jĂ -vu, bien que leurs prĂ©dictions soient en rĂ©alitĂ© inexactes.
Le déjà -vu ne serait pas un rappel mémoire précis, mais une reconnaissance erronée créant une illusion de prévision.
Un mystÚre (presque) résolu
Que le responsable soit lâhippocampe ou le cortex prĂ©frontal, nous pouvons nous accorder sur le fait que ces sentiments de familiaritĂ© proviennent dâun conflit de notre systĂšme de mĂ©moire.
Ce nâest pas une faille dans la matrice, mais bien une curiositĂ© de notre cerveau !
Un bug qui nâa rien dâinquiĂ©tant sur lâĂ©tat de votre santĂ© mentale. Au contraire, il semble ĂȘtre mĂȘme le signe de nombreuses expĂ©riences vĂ©cues et stockĂ©es en mĂ©moire. Plus on vit de choses, plus elles peuvent paraĂźtre similaire, nâest ce pas ?
La prochaine fois que vous en ferez lâexpĂ©rience, souriez : votre mĂ©moire est juste en train de vĂ©rifier si elle nâa pas dĂ©jĂ enregistrĂ© ce moment⊠et elle se trompe !
đĄ Dans certaines cultures bouddhistes et hindoues, le dĂ©jĂ -vu est encore interprĂ©tĂ© comme un aperçu d'une vie antĂ©rieure - une fenĂȘtre momentanĂ©e sur le cycle de rĂ©incarnation appelĂ© samsara.
đ Ce quâil faut retenir
Un dĂ©calage entre nos systĂšmes de mĂ©moire đ : une mauvaise synchronisation entre mĂ©moire Ă court et Ă long terme pourrait expliquer cette impression de âdĂ©jĂ vĂ©cuâ.
Lâhippocampe en ligne de mire đ§ : cette rĂ©gion centrale de la mĂ©moire peut sâactiver Ă tort, crĂ©ant une fausse sensation de familiaritĂ©. Les Ă©tudes sur les patients Ă©pileptiques soutiennent fortement cette hypothĂšse.
Des fonctions exĂ©cutives encore en rodage đ§âđ : les jeunes adultes, dont le cortex prĂ©frontal est encore en maturation, sont plus sujets Ă ces erreurs de traitement.
Un cerveau qui anticipe⊠à cĂŽtĂ© de la plaque đź : le dĂ©jĂ -vu pourrait aussi venir dâune fausse prĂ©diction inconsciente du cerveau, confrontĂ© Ă une situation partiellement familiĂšre.
Un bug rassurant âš : loin dâĂȘtre inquiĂ©tant, le dĂ©jĂ -vu semble ĂȘtre le signe dâun cerveau actif, riche en souvenirs, et en pleine comparaison avec le rĂ©el.
On a mis du cĆur (et quelques neurones) Ă rĂ©diger ce contenu.
Si ça vous a plu, un petit avis ici, ça nous aide Ă©normĂ©ment đâ€ïž
PS : on serait ravi dâavoir vos avis sur cette article. Alors, si vous avez la moindre question, la moindre anecdote, ou tout simplement lâenvie de partager quelques choses avec nous, nâhĂ©sitez pas Ă commenter ci-dessous.
Pour aller plus loin đ
đ Livre : Le sentiment de dĂ©jĂ vu - RĂ©mi Bordei
đ VidĂ©o : Faux souvenirs et dĂ©jĂ vu - France Inter
⥠Réactivation Neuronale
La meilleure façon de consolider ses apprentissages, c'est de les tester rĂ©guliĂšrement (et ça, c'est prouvĂ© par les neurosciences đ). RĂ©activons ensemble ce que nous avons explorĂ© la semaine derniĂšre !
La semaine derniÚre, nous avons vu plusieurs choses dans cet épisode :
Pouvez-vous vous rappeler de ce dont nous avons parlé ?
Prenez 30 secondes pour essayer de vous rappeler au mieuxâŠ
âŠ
[âŠ.]
âŠ.
Allez, on vous aide. Voici les 5 points quâil fallait retenir de cet Ă©pisode :
- La douleur, cette alarme : la douleur, câest une rĂ©ponse du corps Ă un potentiel danger. On parle de douleur aigĂŒe pour les lĂ©sions tissulaires. Tandis que les douleurs persistante causant un dĂ©rĂšglement fonctionnel.
- Un modĂšle multidimensionnel đ§ : des facteurs psychologiques (stress, peur, croyances) et sociaux (environnement, hygiĂšne de vie) jouent un rĂŽle clĂ© dans notre perception de la douleur.
- Un systĂšme trĂšs sophistiquĂ© âŒïž : notre corps et notre systĂšme nerveux possĂšdent de nombreux mĂ©canismes responsables de la sensation de douleur mais aussi de la modulation de son intensitĂ©.
- Tous diffĂ©rents face Ă la douleur đ©č: notre perception de la douleur nous est propre. Des facteurs gĂ©nĂ©tiques mais aussi de notre environnement quotidien lâinfluence fortement.
- Attention ça dĂ©borde đ§ : que ça soit dans la prĂ©vention ou dans la gestion de la douleur, des facteurs comme le sommeil, le stress ou la sĂ©dentaritĂ© jour un rĂŽle crucial sur notre relation Ă la douleur.
Cérébralement vÎtre,
Bertrand & Romain đ§ âš
PS: NâhĂ©sitez pas Ă partager cette newsletter avec vos proches / ami(e)s / collĂšgue(s). Câest une bonne dose de motivation pour nous !
Disclaimer : Les informations présentées dans cette newsletter s'appuient sur des recherches scientifiques. Cependant, les résultats ne sont pas des certitudes absolues et représentent parfois des corrélations sans prouver de causalité directe. La science des neurosciences évolue constamment. Ces conseils sont des pistes de réflexion à considérer avec esprit critique.
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